En écho à notre épisode sur la Halle Brassens de Brive-la-Gaillarde
Dès ses premières chansons, Georges Brassens a été confronté à la censure, bousculant l’ordre moral. Sans que cela n’entrave sa popularité ni son succès.
Un ours, pris dans les phares d’un 33 tonnes. C’est à peu près l’impression qu’ont dû avoir les spectateurs du cabaret parisien de Patachou, ce soir de 1952, lorsqu’ils ont vu arriver sur scène un Brassens pas vraiment enclin à y monter. « On s’est habitué au physique de Georges Brassens, mais il est indéniable que quand ce monsieur entre sans qu’on soit averti cela fait une impression étonnante : ce colosse avec ses cheveux abondants et sa moustache. Nous essayons tous d’être aimable avec ce garçon et de le mettre à l’aise, mais cela ne sert à rien, il reste replié en lui-même puis il prend sa guitare. Il commence à chanter La Mauvaise réputation », se souvenait Patachou en 1955 au micro de La Chaîne Parisienne, dans l’émission Panoramiques.
Le plus censuré
« Dans la lumière il était perdu, affolé il avait l’impression d’être cerné. Il fallait essayer de lui donner l’habitude de rentrer en contact avec le monde. Au début Brassens rentrait et chantait une chanson et puis deux, et, petit à petit, il s’est habitué à la scène, il s’est habitué à devenir un « cabot ». Georges est maintenant une énorme vedette. Il est là où il doit être. »
L’irruption du Sétois dans la chanson française n’est, au fond, pas très différente de sa toute première entrée sur scène. Inattendue, déconcertante. Brutale, parfois. L’anarchiste de toujours, dont les articles écrits pour Le Libertaire en 1946 et 1947 trahissaient déjà une pensée en rupture avec l’ordre établi, choque, bouscule et bouleverse même parfois, au point de devenir le chanteur français le plus censuré, devant Renaud ou Gainsbourg notamment.
Camille Bordas (avec Jean Berthelot de La Glétais)
Crédit photo : Magali Maricot