Livres en breton : derrière les faibles ventes, une langue qui décline (Partie 1/3)

En écho à notre épisode : « Cairn, les turbulences d’une maison d’édition »

 

Les livres en breton peinent à séduire les lecteurs. Plusieurs facteurs jouent sur les faibles ventes : le manque de moyens des écoles bilingues, les locuteurs âgés qui préfèrent lire en français, et une langue menacée. 

 

 

Notre partenaire Mediabask évoquait dans un article « Le boom des albums illustrés bilangues pour les jeunes basques ». En Bretagne, le constat n’est pas le même. Pourtant les cinq départements de Bretagne historique comptent encore 200 000 locuteurs, et plusieurs maisons d’édition tentent de faire vivre la langue. 

 

Coop Breizh édite une trentaine de titres pour la jeunesse chaque année, dont cinq en breton. « Ils sont tirés à 500 exemplaires » précise Trifin Le Merdy, éditrice. Un petit tirage qui s’explique par la faible demande, malgré l’existence d’écoles bretonnantes. « Nous ne travaillons pas particulièrement avec le milieu scolaire, il y a des maisons d’édition spécialisées. Et puis les écoles n’ont pas un gros budget pour acheter des livres » À cela s’ajoute le fait que les parents qui ont scolarisé leurs enfants en classe bilingue ne parlent pas forcément le breton : « Il y a une réticence, ils préfèrent acheter en français ».

 

 

L’éditeur associatif Skol Vreizh a, lui, développé toute une partie de son activité sur le volet pédagogique. Mais comme les professeurs achètent souvent un seul livre pour toute la classe, les ventes ne décollent pas davantage. « Nous éditons les Aventures de Moutig (ndlr : Moutig est un petit mouton blanc. Les albums sont publiés au format bilingue breton/français), une dizaine d’ouvrages sont parus. Nous éditons à 500 ou 600 exemplaires » détaille Paolig Combot, président d’honneur de l’association Ar Falz-Skol Vreizh.

 

 

Des éditions par conviction

 

L’engouement pour les titres en breton n’est pas plus fort chez les adultes. Chez Coop Breizh, ces ventes représentent une part très mince du chiffre d’affaires. « Avec les confinements, on a observé une hausse des ventes de livres, mais ceux en breton n’ont pas bénéficié de cet essor » constate Trifin Le Merdy, avant de poursuivre : « On continue à en éditer par conviction, pour faire vivre la langue et la culture, mais c’est sûr qu’on ne va pas en vivre« .

 

 

Pour encourager le maintien de l’activité, la région Bretagne soutient les maisons d’édition. L’association qui gère Skol Vreizh reçoit par exemple une aide de 30 000 euros par an, et 50% des frais d’édition des livres en breton sont pris en charge. Un soutien essentiel selon Trifin Le Merdy, de Coop Breizh : « Sans ça, nos comptes d’exploitation ne nous permettraient pas de le faire. Enfin, on le ferait, mais dans une moindre mesure.« 

 

 

Si certains livres sont écrits directement en breton, pour la plupart il s’agit d’ouvrages en français traduits dans la langue régionale. Pour pousser davantage la logique et tenter d’attirer les lecteurs, l’Office public de la langue bretonne a lancé au début des années 2010 un programme de traduction des titres à succès de la littérature mondiale. Découvrez son fonctionnement dans la deuxième partie de notre article. 

 

 
Mathilde Loeuille

Crédit photo: Johnny McClung/Unsplash