En écho à notre épisode : « Andro-Switch, la contraception au masculin »
La contraception masculine, bientôt une banalité ? Si les choses bougent peu à peu, notamment dans le Grand Sud-Ouest, le partage de la charge contraceptive au sein d’un couple a encore bien des obstacles sur sa route.
Pour votre contraception, vous êtes plutôt préservatif ou vasectomie ? Ce choix binaire peut prêter à sourire, mais lorsque l’on parle de contraception masculine, ces deux options sont bien souvent les seules proposées, ou tout du moins les seules mises en avant dans la sphère publique. Un rapide coup d’oeil sur les études et autres rapports sur la contraception jettent également un autre constat radical : la contraception rime le plus souvent, seulement avec les femmes, avec en tête de liste, l’utilisation de la pilule contraceptive et ses contraintes que l’on connaît.
Pourtant il existe bien des alternatives qui permettraient à un homme de partager la charge de la contraception au sein d’un couple hétérosexuel, et cela sans passer par l’arlésienne de la pilule contraceptive version masculine. Depuis quelques années, on assiste à une volonté de plus en plus présente chez les jeunes générations, de débloquer cette question de la contraception, au nom de l’égalité et du libre choix, en témoigne notamment les hausses de vasectomie. Autre méthode autrefois très marginale, la contraception thermique commence ainsi à faire changer les consciences, avec pour principaux acteurs, des organismes du Grand Sud-Ouest.
Slip toulousain et anneau girondin
La méthode thermique repose sur un postulat assez simple. En remontant les testicules plus près du corps, on augmente leur température de 2°C par rapport à leur normale. Cette hausse qui semble bénigne va pourtant empêcher la spermatogenèse c’est-à-dire la production de spermatozoïdes. Pour parvenir à cette arrêt de fertilité, l’homme peut utiliser différents dispositifs médicaux, qu’il devra porter 15h par jour pour bénéficier d’un effet contraceptif naturel au bout de 3 mois.
Le plus connu de ces dispositifs est un sous-vêtement dit slip chauffant imaginé par l’andrologue toulousain le Dr Mieusset dans les années 80. Ces sous-vêtements sont la plupart du temps fabriqué par leurs propres porteurs comme avec le collectif GARCON (Groupe d’Action et de Recherche pour la Contraception) qui organise des ateliers de confection dans la Ville rose.
Autre dispositif utilisant cette méthode thermique, l’Andro-switch a fait couler beaucoup d’encre ces derniers mois et nous avions même consacré un épisode sur ce dispositif fabriqué en Gironde. Cet anneau en silicone biocompatible se veut adapté à toutes les morphologies, peu coûteux et promet une contraception efficace, à condition de respecter le protocole. Né de l’imagination d’un infirmier Maxime Labrit, l’Andro-switch était distribué par la société Thorème, qui a revendiqué avoir vendu plus de 10 000 anneaux.
Coup d’arrêt de l’ANSM
L’Andro-switch ne rencontrait pas de répercussions négatives et pouvait se vanter d’une efficacité totale auprès de ses utilisateurs. Pourtant, le 17 décembre 2021, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a décidé de suspendre toute vente ou distribution de l’Andro-switch sauf « dans le cadre d’un essai clinique dûment autorisé ». La raison invoquée, une absence d’un marquage CE « permettant de garantir l’efficacité ainsi que la sécurité d’utilisation ». L’autorité sanitaire va même jusqu’à conseiller aux personnes ayant essayé l’anneau de ne pas concevoir dans les 6 mois suivants l’arrêt de son utilisation.
L’ANSM évoque néanmoins dans son communiqué « l’intérêt réel que pourrait représenter pour la santé publique la contraception thermique masculine au regard du partage de la charge contraceptive entre les femmes et les hommes. ».
Du côté de Thorème, si la sanction de la police sanitaire a été dure, avec la fin de la vente des anneaux, le site a accusé le coup et a annoncé se diriger dans un processus de certification européenne, très coûteuse, tout en continuant sa mission d’information. Des essais cliniques seront également effectués afin de pouvoir prouver l’efficacité de la contraception thermique. L’entreprise annonce sur son site vouloir « défendre l’équité contraceptive et l’accès pour toutes et tous aux moyens de disposer de sa fertilité», et cherche des soutiens financiers afin d’y parvenir.
L’équipe de l’anneau Andro-switch a également lancé une Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC) ainsi qu’une plateforme d’information sur l’équité contraceptive nommée Slow contraception. Ce réseau d’information rejoint ainsi d’autres organismes, comme l’association historique pour la contraception masculine en France, l’ARDECOM (l’Association pour la Recherche et le Développement de la Contraception Masculine) ou encore le collectif GARCON, avec pour mission de faire bouger les institutions face à cette demande sociétale.
Martin Nolibé
Crédit photo : Frufrigi, (CC BY-SA 4.0), via Wikimedia Commons