Des jeunes femmes d’origine maghrébine, émancipées et féministes, cachent leur relation amoureuse avec des hommes blancs et non-musulmans à leur famille pour concilier leur désir d’indépendance avec les attentes familiales. Rahma Adjadj, journaliste de 27 ans, témoigne de cette double vie basée sur le mensonge dans « Nous, les transgressives », un livre essentiel pour celles qui veulent briser le silence.
C’est l’histoire de Rahma Adjadj, une journaliste française d’origine algérienne, depuis ses souvenirs d’enfance à Maubeuge dans le Nord de la France jusqu’à la femme qu’elle est aujourd’hui, du haut de ses 27 ans. Mais ce récit personnel va bien au-delà, il reflète le parcours de centaines de femmes d’origine maghrébine. À travers ses mots, elle met en lumière les générations de femmes qui ont été confrontées à des conflits identitaires et ont dû cacher leurs amours. Rahma Adjadj, elle, a refusé de garder le silence. Puisqu’il fallait « s’écrire ou se taire », elle a choisi de raconter son histoire. Au micro de Jean Berthelot de la Glétais, l’autrice de « Nous, les transgressives » exprime sa volonté de faire entendre les récits étouffés de ces femmes.
« Être transgressive, c’est grandir entre les injonctions de ses parents et essayer de s’inventer sa propre façon de faire. On fait un tri, on passe tout au tamis et on garde ce qu’on a envie de garder. » Pour comprendre les raisons de l’opposition familiale à ses choix amoureux, Rahma Adjadj a mené une enquête auprès de ses parents. Son père, ayant grandi en Algérie, a arrêté l’école à l’âge de neuf ans et a commencé à travailler très tôt. Lui non plus n’a pas été autorisé à choisir librement avec qui se marier. Rahma Adjadj réalise que la pression sociale qu’elle ressent découle de la peur de son père de ne pas perpétuer leur identité et de rompre la transmission culturelle. Quant à sa mère, c’est une « transgressive empêchée ». « On l’a violentée dans son corps, on lui a interdit de passer son permis, de travailler… Ça a été une sorte de poupée. » Depuis la publication de son livre, Rahma Adjadj reçoit de nombreux messages sur Instagram, notamment de catholiques qui se sentent également transgressives. « C’est peut-être le début d’une autre histoire. »
Agathe Hernier
Crédits photos : Éditions les Arenes
En écho à notre épisode : « Rahma Adjadj, transgressive par essence »