La forêt, meilleure centrale photovoltaïque

Pour que le projet Horizeo – une centrale photovoltaïque – puisse voir le jour à Saucats, 1000 hectares de forêt landaise devraient être défrichés. Des protecteurs de l’environnement de Nouvelle-Aquitaine sensibilisent aux multiples rôles des arbres pour la préservation de la biodiversité.

« La forêt demeure la plus grosse zone de biodiversité » commence Alexis Ducousso, chercheur en génétique forestière à l’INRA. Les forêts rendent des services écologiques bénéfiques indéniables à la pérennisation de l’espèce humaine, dont elle a parfois peu conscience. C’est ce que pointent les opposants au projet Horizeo, financé par le groupe Engie et qui prévoit, pour accueillir une centrale photovoltaïque, de défricher 1000 hectares de forêt landaise, comme expliqué dans l’épisode de Podcastine « Saucats, nuages noirs sur la centrale solaire » et sur le site de La Clé des Ondes avec le sujet « Photovoltaïque : greenwashing pour de grands démentiels projets inutiles ».

Les forêts anciennes – de plus de 150 ans –, telles que la forêt des Landes (Gironde) maintiennent la chaleur en hauteur. Leur tronc de plusieurs dizaines de mètres de hauteur et leurs larges branches permettent de créer une barrière de fraîcheur en dessous de leurs feuillages. « Souvent, on constate une différence de 7°C entre la forêt et le milieu ouvert » affirme le chercheur.

La forêt permet la pédogénèse

La forêt assure aussi un processus important : la pédogénèse, soit la formation des sols. Les racines dégradent la roche pour la transformer en argile ou en limon et assurant ainsi la création des sols sur lesquels nous nous déplaçons. Surtout, « la forêt demeure la meilleure des centrales photovoltaïques » explique le passionné des arbres. « En plus de créer de la photosynthèse, elle aspire le carbone ! Retirer de la surface sylvestre pour installer une centrale photovoltaïque au nom de l’écologie n’a donc pas de sens”.

Pour Alexis Ducousso, le plus spectaculaire des bienfaits de la forêt est sa capacité à réguler les cycles de l’eau. En plus de l’utilisation de pesticides et de la pollution, les déforestations réalisées ces cinq dernières décennies ont contribué à la dérégulation des cycles de l’eau et des capacités d’absorption des arbres de la vallée du Ciron. Située en plein cœur de la Gironde, ce lieu de résidence et d’études d’Alexis Ducousso, a connu quatre inondations depuis le 10 mai 2020 – journée de déconfinement – et pas des moindres. « Ce jour-là, la crue était milléniale. C’est à dire qu’elle se présente une fois tous les mille ans, contrairement aux trois autres crues qui l’ont précédée et qui sont centennales, se présentant donc une fois tous les cent ans » explique le spécialiste des arbres. Alors qu’à l’accoutumée, le débit de la crue se mesure en quelques m3 par secondes, lorsque la crue est millénale, elle dépasse les 300 m3 par secondes. « Imaginez plutôt que la crue de la rivière de la vallée du Ciron mesure généralement 15 m de large et qu’un jour elle en fasse 90 m de large ».

 Transmettre le respect de l’arbre

5Mêlant à la fois déconcertation, inquiétude et étonnement, il explique : « mon bâtiment, celui dans lequel je vis, est construit pour éviter les crues décennales – celles qui subviennent tous les dix ans. Mais pas pour les crues centennales. Or, il y en a déjà eu trois ! Les murs datent du Moyen-Age. Aujourd’hui, ils ont lâché à plusieurs endroits ! ». La forêt, grâce à ses facultés d’absorption, est “l’aspirateur par excellence des inondations”. Ce phénomène, enseigné sur les bancs de l’INRA, est aussi inculqué aux enfants de Buros, près de Pau, à plus d’une centaine de kilomètres du Ciron, grâce à l’association Aboretoom.

En ce vendredi après-midi, l’association sensibilise une soixantaine d’enfants au rôle de l’arbre dans le cycle de l’eau sur un terrain que la Maison de l’eau leur a cédé pour partie. « On leur fait découvrir l’anatomie d’un arbre, à laquelle ils sont très réceptifs » explique Dorian, un membre de l’association. Il est midi passée, les nuages gris recouvrent le ciel et les enfants s’amusent à monter et descendre sur un tas de compost.

 « Les enfants sont très précautionneux de la vie »

En plus du volet pédagogique, l’association, grâce à sept membres actifs à temps plein, assure des plantations d’arbres. Sur ce terrain, sont en train de voir le jour : arbousiers, pommiers sauvages, bouleaux, pruneaux, frênes… 1 200 m2 de terrain sont à recouvrir de vies sylvestres. « Ces arbres permettront à la fois de nourrir la biodiversité mais également de nous proposer une ressource alimentaire » explique Olivier. Pour la dernière plantation de la saison – la nouvelle reprendra fin novembre -, chaque enfant a pour mission d’apprendre à planter quatre ou cinq arbres. Si la quantité d’arbres plantés reste un objectif pour l’association, il n’en reste pas moins que la transmission principale demeure l’enseignement d’une plantation de qualité. « En plus d’être curieux de l’évolution d’un arbre, ils . qu’ils ont entre les mains ».

En France, la surface sylvestre augmente chaque année entre 50 000 et 70 000 hectares. La Nouvelle-Aquitaine fait exception. La forêt landaise – située dans le sud de Bordeaux – fait régulièrement l’objet de défrichements pour installer autoroutes et infrastructures nécessaires à l’accroissement urbain.

Lisa Fégné