Pilule : la liberté sous effets secondaires (Partie 1/2)

En écho à notre épisode “Ragnagnas Party : briser enfin les tabous

Depuis le 1er janvier 2022, la plupart des contraceptions féminines sont gratuites jusqu’à 25 ans. La pilule reste le premier moyen contraceptif proposé aux jeunes filles, mais les effets secondaires sont fréquents et parfois lourds.

 

Fin septembre, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a publié une étude sur l’évolution de l’usage de la contraception, ces dix dernières années. Du côté de la pilule, plusieurs changements sont à noter. D’abord, le rejet des pilules contraceptives de troisième et quatrième générations, qui présentent des risques plus forts de phlébite ou d’embolie pulmonaire, au profit des pilules dites de première et deuxième générations. Toutes ces pilules sont « combinées », c’est-à-dire qu’elles fonctionnent à base de progestatifs combinés à un œstrogène. Une formule que certaines femmes ont délaissé ces dernières années, pour se tourner vers des pilules uniquement à base de progestatifs, moins susceptibles de provoquer des effets secondaires. Mais les ventes de ces dernières, en hausse sur la dernière décennie, ne suffisent pas à compenser une baisse globale de celles de la pilule, de l’ordre de 12%.

 

Qui dit arrêt de la pilule, dit souvent autre moyen de contraception. Si les ventes d’implants et de stérilets hormonaux sont restées stables, celles des stérilets en cuivre, donc sans hormones, ont doublé en dix ans.

 

Les raisons de ce changement

 

Podcastine a échangé avec plusieurs femmes qui ont décidé d’arrêter la pilule, pour comprendre leurs motivations. Toutes avaient commencé à la prendre à l’adolescence. Juliette avait 18 ans et venait de rencontrer son premier copain. Rapidement, des effets secondaires apparaissent: « J’ai commencé à prendre du poids, mais comme je sortais d’anorexie je me suis dit que c’était normal. J’avais aussi beaucoup d’acné. » La jeune femme se rend alors chez le médecin. Ce dernier lui prescrit une nouvelle pilule, qui ne devrait pas provoquer de boutons. « Il ne m’a rien expliqué, il m’a juste dit que c’était la seule qui me conviendrait. Elle coûtait 40 euros par mois, heureusement que mes parents payaient parce que sinon je n’aurais pas pu. » 

Mais l’investissement ne signe pas la fin des ennuis : Juliette est de plus en plus en proie à des pensées sombres. Elle en parle avec sa psychologue, et toutes deux finissent par faire le lien avec la pilule contraceptive. Les épisodes dépressifs surviennent toujours au moment où Juliette prend les derniers comprimés de sa plaquette, durant sa semaine de règles. « Quand on a compris ça, j’étais toujours hyper triste mais au moins je savais d’où ça venait. » Mais un jour, son état empire : « tout allait bien dans ma vie mais je voulais mourir, j’ai failli passer à l’acte ». Juliette décide alors d’arrêter définitivement la pilule. Depuis bientôt cinq ans, elle porte un stérilet en cuivre : « J’ai galéré à trouver un gynécologue d’accord pour m’en poser un, ils me disaient que c’était uniquement pour les femmes qui ont déjà accouché ».*

 

Pour les jeunes femmes qui débutent leur vie sexuelle, la pilule est souvent le moyen de contraception automatiquement prescrit. Elle est aussi utilisée pour les adolescentes qui sont mal réglées, pour créer des cycles artificiels. C’était le cas de Leah, qui n’avait parfois pas de règles pendant trois mois : « J’ai pris une pilule faiblement dosée, Optilova, qui a bien fonctionné au départ puisque j’avais des cycles réguliers. Mais au bout d’un an et demi, mes règles sont devenues très douloureuses, mes seins aussi ». Sa gynécologue lui prescrit alors une autre pilule, mais les effets secondaires reviennent au bout d’un an, sous forme de douleurs dans les ovaires et de formations kystiques dans la poitrine : « au départ c’était pendant les règles, puis tout le temps ». En accord avec son médecin, Leah a définitivement arrêté la pilule. « Et je n’y reviendrai pour rien au monde ! »

Arrêter la pilule a aussi été, pour certaines femmes, l’occasion de se réapproprier leur corps. Ce sera le sujet de la deuxième partie de cet article.

 

Mathilde Loeuille

 

*Nous publierons mercredi un entretien avec le Planning Familial de Gironde, qui reviendra sur plusieurs points abordés dans cet article, notamment la pose d’un stérilet chez une femme jeune qui est autorisée par la Haute Autorité de Santé.  

 

Crédit photo : rhsupplies/unsplash