Présidentielle 2022, la voix des assos – l’Alternative Urbaine

Chaque vendredi jusqu’à l’élection présidentielle, Podcastine donne la parole à une association de Nouvelle-Aquitaine pour qu’elle explique ses actions et ses attentes vis-à-vis du prochain mandat. Marie Hebrard est salariée de l’association l’Alternative Urbaine à Bordeaux.

 

Podcastine : Pouvez-nous présenter l’association ?

 

Elle a été créée en 2017. Nous travaillons sur deux volets. Sur le plan culturel, nous organisons des balades dans des quartiers méconnus, c’est-à-dire excentrés, cloisonnés ou cibles de préjugés. Chaque balade valorise l’histoire industrielle des quartiers, mais aussi les anecdotes des habitants, leur mémoire. Elles sont proposées à prix libre de mai à novembre. Nous couvrons aujourd’hui huit quartiers dans quatre villes.

Sur le plan de l’insertion professionnel, les balades sont menées par des personnes qui sont en recherche d’emploi depuis longtemps. Durant nos phases de recrutement, nous rencontrons les acteurs de l’emploi dans chaque quartier, comme les centres sociaux ou Pôle Emploi… qui peuvent nous mettre en contact avec des personnes en recherche d’emploi. Ils deviennent alors des « éclaireurs ». Nous leur proposons une formation de deux mois et demi, puis ils sont rémunérés pour mener les balades pendant sept mois et demi. Cette année, ils étaient douze. Ils seront quatorze l’année prochaine.

 

Est-ce qu’ils sont nombreux à avoir trouver un emploi, après cet accompagnement de dix mois ?

 

Depuis 2017 nous avons 60% de « sorties positives », donc des gens qui ont réussi à retrouver un emploi ou une formation qualifiante. Bien sûr avec la pandémie, cela a été plus difficile et nous avons eu 40% de sorties positives en 2020. Pour 2021, nous devrions arriver à 50%.

Au-delà de ces chiffres, certains ne retrouvent pas un emploi mais ils ont retrouvé une vie sociale, ils se sont ouverts. Avec l’Alternative Urbaine, ils ont appris à accueillir un groupe, à donner des informations, à s’adapter à différents publics. Ce sont eux que les gens viennent voir pour les visites, ils sont des acteurs culturels et c’est un changement de situation qui les aide à reprendre confiance.
Par ailleurs, si l’on sent que l’on peut encore accompagner un éclaireur, on lui propose de signer pour une deuxième année avec nous.

 

Sur le plan politique, qu’attendez-vous du prochain mandat ?

 

J’aimerais surtout que les politiques reviennent sur les dernières réformes. En 2019 il y a eu une réforme pour renforcer les contrôles des demandeurs d’emploi, via la plateforme numérique de Pôle Emploi. Le problème, c’est que certaines personnes sont en rupture numérique et ne savent pas se servir de cette plateforme. Elles se retrouvent donc sur la touche alors qu’elles sont bien en recherche d’emploi, et c’est le même problème avec la réforme de dématérialisation des démarches administratives. Il y a donc des gens qui ne souscrivent pas à leurs droits.

Et puis la réforme du chômage c’est une vraie catastrophe. Il faudra maintenant six mois de contrat sur les 24 derniers pour toucher des droits, au lieu de quatre jusqu’ici. Nous, on accompagne des personnes qui sont éloignées de l’emploi depuis longtemps. Souvent après leur passage chez nous, elles trouvent un petit contrat court qui leur permet de relever légèrement leur niveau de vie, de sortir la tête de l’eau et cela les aide ensuite à trouver un contrat plus long. Là, il faudra avoir six mois de contrat tout de suite. Cela me met en colère, j’aimerais bien que les politiques se posent des questions, surtout dans le contexte actuel qui est difficile, où il y a beaucoup de gens au chômage.

 

Vous avez l’impression que ces sujets vont être abordés durant la campagne ?

 

Non, elle va tourner autour du sanitaire et de la sécurité. Pour l’emploi, personne ne va vouloir revenir sur ces réformes, il y a ce bon vieux mythe qui dit qu’il « suffit de traverser la rue » pour trouver un travail.

 

 
Mathilde Loeuille

 

Crédit photo : Gabriel Taïeb