Syndrome des ovaires polykystiques (4/5) : « Ce n’est pas socialement accepté d’en parler au travail »

Podcastine mêle toute la semaine les témoignages de neuf femmes atteintes du syndrome des ovaires polykystiques, un dérèglement hormonal qui touche une femme sur dix. La pathologie, peu connue des professionnels de santé, est un sujet encore tabou dans le monde professionnel. 

Retrouvez les témoignages précédents en cliquant ici. 

Comme beaucoup de femmes atteintes du SOPK, Sara a du mal à gérer ses émotions et est très sujette au stress. Cela fait partie des symptômes. En 2012, un choc émotionnel entraîne une coupure de règles pendant sept ans. Et en 2019, « j’ai eu une très grosse crise de stress qui a provoqué un Tako-tsubo, un infarctus ». En juin dernier, « rebelote, et cette fois c’est plus grave, je me fais opérer car mon artère principale s’est rétractée ». A cette période, elle change de gynécologue et lui parle de ses problèmes cardiaques. Pour la première fois, on lui répond que tout est lié au syndrome des ovaires polykystiques. Ses problèmes cardiaques sont aujourd’hui reconnus comme une Affection Longue Durée, ALD, par la sécurité sociale, et elle voudrait qu’il en soit de même pour le SOPK.

 

Parmi les femmes interrogées pour cet article, peu ont entamé des démarches pour que leur pathologie soit prise en compte au travail. Emmanuelle, qui a eu ses règles en continu pendant deux ans, est indépendante depuis quelques années, « donc je me gère ». Léa, qui travaille en Loire-Atlantique, n’a jamais raté un jour de cours, ni un jour de travail pas la suite, malgré ses douleurs chroniques.

« Le seuil de résistance à la douleur augmente avec le temps, même si ça ne devrait pas être normal de souffrir. Parfois je ferme la porte de mon bureau et je me plie en deux tellement j’ai mal. »

 

De son côté, Amélie a discuté il y a quelques jours avec son médecin du travail : « Il m’a dit que je peux avoir une RQTH (ndlr : reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) pour le SOPK et donc demander un jour de télétravail ou un arrêt à la dernière minute ». La jeune parisienne n’a pas encore fait la demande, mais elle l’envisage car « parfois je suis assise à mon bureau et j’ai l’impression qu’on me plante une aiguille dans l’ovaire, encore et encore ». 

 

Affronter le regard des autres

 

Pour Marion, assistante de direction qui travaille dans une équipe majoritairement masculine, évoquer le SOPK au bureau est impensable : « Ce n’est pas socialement accepté, ce n’est pas dans la culture d’entreprise. Dire qu’on a ses règles, c’est déjà tabou. » Nina, au contraire, a déjà pu rentrer chez elle lorsque ses douleurs liées aux règles étaient trop fortes. « Je travaille dans une bonne équipe, avec beaucoup de femmes, il n’y a pas de problème. »

Au-delà de la prise en compte des douleurs, Audrey souhaiterait que certains actes médicaux soient pris en charge par la sécurité sociale. Elle souffre d’hirsutisme, un développement excessif de la pilosité, et explique « que le regard des autres, c’est ce qui est le plus dur à vivre ». Elle a demandé à ce qu’une épilation faciale au laser soit prise en charge, mais son dossier a été refusé. « Ils disent que c’est de la chirurgie esthétique ». Le salaire d’Audrey ne lui permet pas de financer elle-même l’épilation au laser, alors elle continue à se raser tous les matins. « Personne ne prend en considération le SOPK, on en parle seulement pour se moquer des femmes à barbe ».

Le syndrome des ovaires polykystiques, SOPK, est un dysfonctionnement hormonal qui touche une femme sur dix selon l’INSERM. L’institut national de la santé et de la recherche médicale le décrit en ces termes : « le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est dû à un dérèglement hormonal d’origine ovarienne et/ou centrale (au niveau du cerveau). Il entraine une production excessive d’androgènes, en particulier de testostérone, habituellement produites en petite quantité dans l’organisme féminin.

Le nom de cette maladie vient de sa description, effectuée dans les années 30, reposant sur l’observation de ce que l’on peut penser être des kystes dans les ovaires des patientes. En réalité, il s’agissait de multitudes de folicules au développement inachevé. » Or, les folicules doivent maturer pour provoquer l’ovulation. Le SOPK peut entraîner des symptômes variés : problèmes de fertilité, surpoids, hirsutisme soit développement excessif de la pilosité, sautes d’humeur, etc. Aujourd’hui, il n’existe pas de traitement curatif.

Mathilde Loeuille