Football : les équipe féminines gagnent du terrain (Partie 2/3)

Cette dernière décennie a marqué un tournant pour le football féminin, sur le plan de la diffusion à la télévision. Mais la pratique reste tout de même peu médiatisée par rapport au football masculin.

 

Qui dit diffusion des matchs de football à la télévision, dit droits de diffusion. Quand Canal + a acquis les droits pour diffuser la Première Division entre 2018 et 2022, le groupe a signé un contrat de 6 millions d’euros avec la Fédération Française de Football. L’argent a ensuite été versé dans un “pot commun” destiné à développer à la fois le football masculin et féminin. Un fonctionnement qui diffère de la Ligue 1 (masculine), où l’argent est directement réparti entre les clubs par la Ligue de football professionnel (LFP), rattachée à la Fédération. 

La Première Division, à l’inverse de son homologue masculine, n’est pas professionnelle. « Les clubs reçoivent une aide pour la structuration des équipes féminines, mais je ne crois pas qu’elle soit destinée à financer les contrats des joueuses », avance Syanie Dalmat, journaliste au service Football de l’Equipe. Le site RMC sport va plus loin, en affirmant qu’aucune redistribution n’est effectuée par la Fédération :« Au sein de la FFF, il a été dit aux clubs de D1 que ce contrat serait une manière de rembourser l’investissement des saisons précédentes pour la discipline. Les clubs perçoivent seulement 50 000 euros par saison d’aide provenant du football amateur. Ils peuvent également faire une demande de subvention de 85 000 euros, mais le cahier des charges est trop important pour certains clubs. »

 

Championnat à deux vitesses

 

De nombreuses joueuses de D1 sont donc semi-professionnelles. « Beaucoup travaillent à côté ou poursuivent leurs études. Et forcément, si elles ne parviennent pas à se consacrer au foot à plein temps, les performances ne peuvent pas être les mêmes » déplore Syanie Dalmat. En résulte un championnat à plusieurs vitesses, avec des clubs comme le PSG et l’OL qui ont les moyens d’attirer les meilleures joueuses, et des clubs toujours associatifs.

 

« La vérité, c’est qu’à cause de ces inégalités, un certain nombre de matchs de D1 sont inintéressants à regarder », assène Nicolas Delorme, sociologue du sport. « Il faut que le championnat se professionnalise pour attirer. » En 2018, un premier pas a été fait avec le naming de la Première Division, rebaptisée D1 Arkema pour trois saisons. Un contrat à trois millions d’euros, dont une partie va être distribuée aux clubs selon Vincent Cottereau, chargé de projet chez Arkema, interrogé par le média Foot d’elles : « 200 000 euros vont à la FFF pour les frais fixes et le reste est réparti entre les douze clubs engagés dans le championnat, soit 80 000 euros par club pour développer leur section féminine. »

 

Les clubs à la recherche de sponsors

 

Individuellement, « les clubs de D1 arrivent à attirer quelques sponsors, mais les montants ne sont pas faramineux », constate Nicolas Delorme. Et leurs intentions pas forcément louables :

 

« Pour certaines sociétés, il y a un effet d’aubaine parce que ce n’est pas très cher de sponsoriser une équipe féminine. Pour d’autres, il y a une sorte de green washing sexué, l’idée étant de se faire bien voir en montrant que l’entreprise s’engage pour le développement du sport féminin. »

 

Le sociologue parle de cercles vertueux ou vicieux. « Si l’équipe est médiatisée, elle va attirer les sponsors. S’ils sont plusieurs, elle va pouvoir faire jouer la concurrence et donc être sponsorisée plus chère. Au contraire, si elle n’est pas médiatisée, elle ne va attirer que très peu de sponsors et il n’y aura pas de concurrence ». Lorsqu’il parle de médiatisation, Nicolas Delorme n’évoque pas que la diffusion à la télévision, mais la couverture médiatique au sens large. « Il y a des progrès mais le sport féminin reste très à la marge. »

Mathilde Loeuille

Crédit photo : Rhett Lewis/Unsplash