La mobilisation continue à Pessac contre le CRA de la discorde

La mobilisation continue. Deux collectifs se sont réunis ces derniers jours pour protester contre l’implantation du nouveau Centre de Rétention Administrative (CRA) à Pessac, mais pas avec les mêmes ambitions.

D’après la définition donnée par le ministère de l’immigration un CRA « est un bâtiment surveillé où l’administration peut retenir, pour une durée limitée et sous contrôle juridictionnel, les étrangers faisant l’objet d’une procédure d’éloignement et ne pouvant pas quitter immédiatement la France».

Si ces centres ne sont donc pas des centres de détention au sens propre, dans les faits, les choses ne sont pas aussi simples. Les CRA font l’objet de nombreuses critiques depuis des années que ce soit par les conditions de vie qui se sont notamment encore plus dégradées pendant la pandémie, des violences ou des enfermements que certaines associations comme La Cimade jugent totalement arbitraires.

Ces dernières années, des plaintes pour maltraitance, des grèves de la faim et même des cas de suicides ont amené les avocats, élus ou même médecins a dénoncé les conditions de vie, jugées indignes, de ces centres. Le 29 juillet 2021, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) parlait même d’une situation « alarmante » dans les CRA.

Du plus petit CRA de France à l’un des plus grands

Dans la région bordelaise, le CRA se trouve actuellement dans les sous-sols de l’hôtel de police, dans le quartier de Meriadeck. Ce centre d’une capacité de 20 personnes est le plus petit CRA de France qui en compte vingt-cinq d’après les derniers chiffres du ministère. Mais un nouveau centre d’une valeur de 23 millions d’euros, pouvant accueillir jusqu’à 140 migrants et 210 fonctionnaires, devrait ouvrir sur ordre de la préfecture en 2024, et ce au grand dam des riverains.

Le lieu choisi est imposé par la préfecture sans concertation en avril 2020. C’est un lopin de terre proche de la sortie 13 de la rocade bordelaise. Le terrain situé dans les quartiers du Monteil à Pessac « au contact direct des habitations, est depuis près de 50 ans, un espace vert ouvert à tous, enfants, sportifs ou promeneurs», souligne la ville de Pessac dans un communiqué suite au vote d’une motion à l’unanimité par le conseil municipal le 22 mars. La ville de Pessac a soumis depuis deux contrepropositions à la Préfète, dont la dernière pour l’implantation du CRA, au Bioparc à cheval entre les villes de Pessac et Mérignac qui sont pour le moment toujours à l’étude.

Entre dénonciation et conciliation pour les collectifs

Dans l’attente d’une décision les habitants des quartiers concernés se sont mobilisés sous le nom d’un collectif CRA PAS LA qui a récolté dans une pétition près de 5600 signatures contre l’implantation du centre.

Après presque 100 jours de mobilisation, le collectif s’était réuni le lundi 9 mai sur le site du projet. Composés pour la plupart par des habitants des quartiers concernés, ses membres ne sont pas contre l’idée du centre de rétention en lui-même, mais bien contre son installation dans le quartier du Monteil. Ils privilégient avant tout une conciliation avec la préfecture, et craignent que l’existence de l’autre collectif mette en danger ces discussions comme ils l’ont confié au journal Sud Ouest. 

Quelques jours plus tôt, c’était un tout autre collectif qui se réunissait sur le même site du projet à Pessac, le collectif Anti CRA qui regroupe une trentaine d’associations de tous bords.

Ce collectif le revendique, ils ne veulent pas d’un CRA « ni à Pessac, ni à Mérignac, ni ailleurs » et dénonce la politique migratoire du gouvernement. « Nous ne cautionnons pas cet enfermement qui détruit les vies de personnes venues chercher une vie plus sûre », souligne le collectif dans son communiqué qui dénonce les CRA comme « l’instrument privilégié d’une politique migratoire toujours plus répressive à l’égard des personnes exilées ». Selon le collectif, c’est près de 50 000 personnes qui seraient concernées chaque année par les CRA.

Martin Nolibé

Crédit photo : Christian Lue, Unsplah