En novembre 1983, sur la ligne Bordeaux-Vintimille, le jeune algérien Habib Grimzi fut jeté de son train en marche. Plus qu’un simple fait-divers, ce meurtre a joué un rôle capital dans l’histoire des luttes antiracistes en France, en pleine Marche pour l’égalité et contre le racisme.
Depuis dix ans, la France assiste à une vague de violences commises avec une certaine impunité envers les personnes considérées comme “nord-africaines” ou “arabes”, alors qu’une importante population algérienne vit et travaille en France, notamment dans l’industrie. « Le contexte de la guerre d’Algérie, le contexte post-colonial, peut aussi être un élément d’explication », selon Céline Regnard, historienne des migrations contemporaines et des villes portuaires et maîtresse de conférences à Aix-Marseille Université.
Le meurtre de Habib Grimzi, dans la nuit 14 au 15 novembre, d’une violence glaçante, va cristalliser un grand nombre de ces tensions. Mais qui était ce jeune homme ? Ni militant, ni immigré, il était au mauvais endroit au mauvais moment, diraient certains. Ce dernier serait né en mai 1957 à Trafaoui, près d’Oran, en Algérie. Mesurant un bon mètre soixante, il est décrit comme quelqu’un de plutôt poli et discret. Fils d’ouvrier spécialisé, il appartenait à une grande fratrie. Après son service militaire, il devint agent de sécurité dans un dépôt de la Naftal, une firme de distribution de produits pétroliers. Il aimait le football et la science-fiction. Début novembre 1983, il partit pour quelques jours à Bordeaux, rejoindre une amie avec laquelle il imaginait peut-être un futur à deux. Mais le rêve fut de courte de durée, le jeune Habib devant prendre le chemin du retour. Voyageant avec son Walkman, peut-être pensait-il déjà à son retour à la maison. Il ne verra plus jamais ni Bordeaux, ni Oran.
En écho à notre épisode : « Grimzi, un billet sans retour – Épisode 1 : L’étranger »
Publié le 10 janvier 2024