Contraception : on fait le point avec le Planning Familial de Gironde

En complément de notre article sur la pilule et ses effets secondaires, nous publions un entretien avec Marie-Liesse Montes, directrice du Planning Familial de Gironde.

 

Podcastine : Depuis le 1er janvier, la plupart des moyens contraceptifs féminins sont gratuits jusqu’à 25 ans. Une mesure notamment motivée, selon le gouvernement, par un recul de l’usage de la contraception à cause de difficultés financières. Est-ce que vous le remarquez également lors de vos échanges pendant les ateliers ou les permanences que vous tenez en Gironde ?

 

Marie-Liesse Montes : On intervient beaucoup en collège et lycée, et les jeunes ne vont pas verbaliser les difficultés financières. Mais nous savons, très clairement, que c’est une tranche d’âge assez précaire et d’ailleurs le problème ne se résout pas automatiquement à 25 ans. Tout le monde n’a pas un CDI ou un bon salaire à 25 ans. Lors de nos permanences, nous recevons parfois des femmes pour parler de la contraception d’urgence, la pilule du lendemain – qui porte d’ailleurs ce nom à tort puisqu’elle peut être utilisée au-delà du lendemain. Depuis le 1er janvier elle est gratuite jusqu’à 25 ans, mais ensuite elle coûte huit euros. Ce n’est pas énorme, mais en fin de mois, si la personne est à découvert, cela peut être compliqué. La contraception d’urgence est accessible en centre de planification, mais encore faut-il pouvoir s’y rendre sur les horaires d’ouverture et ce n’est pas facile quand on travaille.

 

Est-ce que la jeune génération vous semble bien informée sur les différents moyens de contraception ?

 

Cela progresse. Pendant de longues décennies, la pilule a été vue comme la seule solution contraceptive. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas mais c’est rare de rencontrer quelqu’un qui connaît tous les moyens de contraception.

Je remarque aussi que, par rapport aux adultes qui vont avoir des réflexions « techniques » sur la contraception, comme l’impact sur leur santé, les jeunes ont des préoccupations plus larges. Bien sûr, ils demandent où ils peuvent se procurer la contraception, si c’est gratuit, mais ils ont aussi des questions sur le consentement, les relations affectives, sur ce que cela fait de faire l’amour…

 

Nous évoquions dans l’article publié entre hier et avant-hier une volonté, chez certaines femmes, de se débarrasser des hormones de synthèse. Le constatez-vous aussi ?

 

Oui, c’est un phénomène que l’on observe mais qu’il ne faut pas surestimer. La pilule reste quand même le moyen de contraception le plus utilisé. Mais c’est vrai que la jeune génération a des attentes, d’autres critères de choix. Cela crée parfois une incompréhension avec des femmes plus âgées qui ont connu une période où la pilule était interdite, et qui ont vécu la légalisation (ndlr : en 1967 avec la loi Neuwirth) comme un progrès incroyable.

Lors de nos ateliers, nous ne diabolisons pas la pilule, mais nous ne disons pas non plus que tout va bien aller. Nous évoquons les effets secondaires, même si ce n’est pas évident parce qu’ils varient d’une femme à l’autre. Beaucoup la supportent très bien, d’autres ont des effets secondaires supportables et ne veulent pas changer de contraception, et certaines ont des effets secondaires qui affectent leur quotidien. 

C’est très subjectif, mais ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas écouter les témoignages. Certains médecins vont dire à leur patiente « C’est dans votre tête, ce n’est pas la pilule qui provoque ça ». Mais à la limite, peu importe ! Même si c’est dans sa tête, cela veut dire qu’elle n’est pas à l’aise avec ce mode de contraception. Il n’existe pas encore de contraception parfaite, mais une bonne contraception est une contraception qui est choisie. J’invite vraiment les femmes à poser des questions à leur médecin ou sage-femme au moment de la prescription d’ordonnance, pour comprendre quelle pilule est prescrite et pourquoi pas une autre.

 

Dans ce même article, nous donnons la parole à une jeune femme qui a eu des difficultés à se faire poser un stérilet, puisque les gynécologues refusaient d’en poser à une femme qui n’a pas encore eu d’enfant. Est-ce que ces gynécologues avaient raison ?

 

La pose de Dispositif intra-utérin (DIU) est tout à fait autorisée pour les femmes qui n’ont pas encore vécu de grossesse. La Haute Autorité de Santé va dans ce sens, il y a de plus en plus de jeunes femmes qui se tournent vers le stérilet, mais certains médecins s’accrochent encore à leurs propres croyances.

 

Quel chemin reste à parcourir sur le sujet de la contraception ?

 

Au Planning Familial, nous menons tout un travail autour de la stérilisation définitive. Il y a encore beaucoup de freins, de tabous à ce sujet. Par ailleurs, il y a aussi le gros chantier de la contraception masculine. Pour l’instant, le choix est très restreint. Il y a le préservatif, la contraception hormonale par injections qui est contraignante, la vasectomie qui est très utilisée dans les pays anglo-saxons mais peu en France, et les méthodes thermiques. Ces dernières consistent à remonter un peu les testicules dans le corps, de manière à faire monter la température et donc bloquer la spermatogenèse. Andro-Switch avait tenté de commercialiser un anneau mais l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament a suspendu la vente, car il n’y a pas eu d’étude officielle. Tant qu’il n’y en aura pas, ça n’avancera pas. Pourtant, nous entendons de plus en plus de demandes, de la part d’hommes qui n’ont pas envie d’être papa par surprise, ou qui veulent décharger leur partenaire du poids de la contraception.

 

Propos recueillis par Mathilde Loeuille