Le Précis – Gravir sa montagne, le parcours de transition de Sascha

Chacun de nous, dans sa vie, a sa propre montagne à gravir. Pour Sascha, ce n’était ni de l’Everest, ni de l’Himalaya dont il était question, mais plutôt d’une montagne plus personnelle. Sascha raconte à Podcastine son parcours de transition vers la non-binarité dans l’épisode du premier juin, marquant ainsi le début du Mois des Fiertés.

Sascha pensait être une femme cisgenre. Mais un jour, devant la télévision, tout a changé lorsqu’un homme non-binaire, Arnaud Gauthier-Fawaz, a défié les normes de genre établies. Avec une voix grave et une barbe, il a demandé : « Qu’est-ce qui vous fait dire que je suis un homme ? » Cette simple question a ouvert les yeux de Sascha sur la diversité des identités de genre, effaçant les frontières traditionnelles entre hommes et femmes. Au micro d’Agathe Hernier, il raconte son parcours de transition vers la non-binarité pour Podcastine.

Sascha s’est toujours senti un peu en décalage par rapport à ses amies qui se maquillaient et portaient des robes. Lui, rêvait secrètement d’une barbe et de pectoraux. « Beaucoup de personnes trans nées femmes ont envie de s’arracher les seins, c’est quelque chose de très fort tellement c’est insupportable. » À cette époque, la dysphorie de genre, une profonde détresse provoquée par un désaccord entre son identité de genre et son genre assigné à la naissance, ne l’avait pas encore frappé. Mais peu à peu, ce mal-être s’est immiscé dans sa vie, se transformant en une montagne imposante qu’il devait gravir. Étudier à Alicante, en Espagne, a été un tournant majeur pour Sascha. Loin de son environnement habituel, il a enfin trouvé la liberté nécessaire pour explorer son identité de genre. Sans contraintes, ni jugements. Pour la première fois, « je me suis senti moi ».

Puis arrive l’année 2020, marquée par la pandémie de Covid-19 et les périodes de confinement. L’occasion parfait pour lui « d’expérimenter ». Il a demandé à ses amis d’utiliser le pronom « il » et de l’appeler Sascha. Avec le temps, il a ressenti une euphorie de genre lorsqu’on le genrait au masculin. L’euphorie de genre, « c’est quand on ressent en soi une chaleur, tellement ça fait du bien. » Cette sensation l’a réconforté, lui donnant la certitude d’avancer sur le chemin d’une identité plus masculine. Sascha a alors décidé de faire son coming-out auprès de sa famille, en commençant par sa maman avec qui il est très proche. Il savait que la compréhension et l’acceptation pouvaient prendre du temps, surtout pour les parents. « Déconstruire la manière dont tu as parlé de quelqu’un pendant plus de 20 ans, c’est plus compliqué. »

Sascha a commencé à porter un binder, un vêtement de compression pour aplatir la poitrine. Mais arrivé à l’été 2021, avoir des seins était devenu trop insupportable. C’était l’été de trop. Sascha a pris la décision de faire une torsoplastie. En septembre, il a pris rendez-vous avec un chirurgien et les choses se sont déroulées très rapidement. Après l’opération, Sascha était comblé de bonheur. Les tétons étaient parfaits, les cicatrices bien guéries, presque invisibles au bout d’un an et demi. La torsoplastie a été une libération. « Je pense que c’était la dernière chose qu’il fallait que je fasse de manière urgente pour me sentir bien. » Quant à la question de prendre de la testostérone, elle reste encore en suspens. Même s’il rêve toujours d’une barbe, Sascha aime son expression de genre androgyne. « Je n’ai pas envie de prendre de la testostérone pour les autres ! » Après trois années de transition, Sascha se sent enfin en harmonie avec lui-même. « Je crois que, ça y est, j’ai gravi ma montagne. »

Agathe Hernier

Crédits photo : Emma Guizot, @egma___